Portraits d'anciens étudiants
Seyfen JAOUA
Coordinateur de relations internationales pour le département d’Ibaraki dans le cadre du programme JET : « Apprendre le japonais permet de communiquer avec 125 millions de nouvelles personnes et de se connecter à une tout autre culture »
Diplômé en 2021 de la licence LLCER (Langue, Littérature, Civilisation Étrangère et Régionale), Seyfen Jaoua a été sélectionné par le programme JET (Japan Exchange and Teaching) et il travaille désormais au Japon en tant que coordinateur de relations internationales.
« Apprendre le japonais, c’est possible »
« Voir quelqu’un dans mon entourage qui apprenait le japonais, ça a été un gros déclic pour moi » explique Seyfen. En effet, pour lui « A ce moment-là, apprendre le japonais était impossible, c’était trop loin ». Mais observer une personne proche de lui découvrir cette langue et en apprendre les bases lui a fait réaliser qu’apprendre la langue japonaise était envisageable. Ainsi, en parallèle de sa licence d’éco-gestion, Seyfen commençait à apprendre le japonais en école de langue.
Suite à cette première année de licence d’éco-gestion avec laquelle il ne se voyait pas construire un avenir, il a découvert l’existence de la licence LLCER. Par chance, celle-ci rassemblait les matières qui l’intéressaient : « C’est une filière générale mais axée sur les langues », en l’occurrence le japonais, une langue qui lui plaisait d’ores et déjà. Seyfen a donc décidé de s’orienter vers cette licence afin d’approfondir son apprentissage de la langue japonaise.
« Habiter au Japon, c’était mon but ultime »
A l’issue de ses trois ans de licence, Seyfen était déterminé à établir sa vie dans le pays : « Dans tous les cas je voulais aller au Japon » confie-t-il. Pour ce faire, il avait envisagé trois options différentes pour atteindre son objectif. Néanmoins, sa préférence était claire : « Mon choix numéro un c’était de faire le programme JET ». Bien qu’il ne pensait pas forcément être pris au vu de la difficulté de la sélection, Seyfen fait finalement partie des 315 français à avoir été engagés par le programme JET depuis 1989.
En plus de son apprentissage de la langue japonaise, la licence LLCER de Strasbourg lui a permis de découvrir les us et coutumes japonais. Seyfen déclare ainsi :« Mes trois années de licence en japonais m’ont permis de préparer ma vie au Japon. »
Ses missions au sein du programme JET
« En arrivant, normalement on a déjà des missions de prévues mais on peut aussi proposer des projets, comme j’ai pu le faire pour des cours d’anglais et des cours de français. » En effet, Seyfen est employé en tant que coordinateur de relations internationales, il travaille à la fois au conseil départemental ainsi que dans l’association internationale d’Ibaraki.
Tout d’abord, au conseil départemental, il intervient en tant qu’interprète français-japonais ou anglais-japonais lors d’échanges commerciaux ou de rencontres officielles, mais il est également en charge de gestion d’échanges scolaires entre des lycéens de l’Essone qui apprennent le japonais et des lycéens d’Ibaraki qui apprennent l’anglais. De plus, lui et ses collègues étrangers sont amenés à présenter leurs pays respectifs dans les écoles du département et ils ont également pris l’initiative de donner des cours d’anglais à leurs collègues japonais.
Ensuite, au sein de l’association internationale d’Ibaraki, il est le responsable du « World Culture Seminar » (世界文化セミナー sekai bunka seminaa), dans lequel des étrangers résidant à Ibaraki présentent leur pays à des Japonais en anglais. Il participe à l’organisation diverses activités culturelles telles qu’un concours d’éloquence pour les étrangers résidant à Ibaraki ou encore une visite guidée du département pour les étudiants internationaux. En outre, Seyfen souhaite montrer aux jeunes Japonais qu’il est possible d’apprendre le français, de la même manière qu’il a été possible pour lui d’apprendre le japonais. C’est pourquoi il a proposé de donner des cours de français à des lycéens Japonais afin de leur donner envie d’apprendre le français : « Mon objectif est de promouvoir le rayonnement de la langue française. »
« Se fixer un objectif final : pourquoi j’apprends le japonais ? »
Enfin, Seyfen affirme que chaque personne apprenant le japonais devrait se fixer ses propres objectifs et tout mettre en œuvre pour y parvenir. « Ne te compare pas à autrui, compare-toi simplement à toi-même. Est-ce que tu as progressé depuis hier, est-ce que tu vas de l’avant vers ton objectif ? »
Dans son cas, l’objectif était de pouvoir vivre et travailler au Japon. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde, ainsi chacun doit créer son propre projet. « Il faut travailler par soi-même, pour soi-même avec des objectifs personnels et ne pas se comparer aux voisins. »
Son message d’encouragement pour les étudiants : « L’espoir que je peux donner c’est que l’on peut avoir un niveau de japonais suffisant après une licence de japonais pour vivre et travailler au Japon à condition de s’en donner les moyens. »
Pauline MAZONNETTO
Professeure de français à Ōsaka : “Le japonais, ce n'est pas seulement les mangas et les animés.”
Professeure de français en langue étrangère, Pauline Mazonnetto a étudié le japonais en licence et en master à l’université de Strasbourg. Aujourd'hui, elle enseigne le japonais à Ōsaka, au Japon.
Apprendre le japonais à l’université
Pauline a commencé son parcours d’étudiante par la licence LLCER de japonais où elle a pu y apprendre la langue, l’histoire et la culture japonaise, notamment au travers de traductions diverses.
Après sa licence, elle a décidé de poursuivre son parcours avec le master LLCER, dont elle dit garder de très bons souvenirs : “En master, nous avons continué de traduire des textes, mais sur des sujets de spécialités des professeurs. Ce qui était vraiment intéressant, parce que les professeurs nous donnaient vraiment beaucoup d'informations supplémentaires et nous produisions des traductions plus qualitatives.” explique-t-elle.
Pauline mentionne également les colloques, parfois présentés en japonais, auxquels elle a pu participer tout au long de son master et qui lui ont permis à la fois d’acquérir de nouvelles connaissances tout en améliorant sa maitrise de la langue. Pauline a également eu la possibilité de participer à plusieurs séminaires dont celui avec l’université Hôsei qu’elle estime être le plus important : “Au deuxième semestre, nous avons participé au programme d'échanges philosophiques avec l'université de Hôsei, première fois où nous avions pu pratiquer le japonais à l'oral. C'était donc très difficile, mais vraiment très enrichissant aussi bien intellectuellement qu'humainement.”
Hormis les différents cours ainsi que les colloques et les séminaires, le master lui a également permis de partir en échange à l’université d’Ōsaka, une expérience très enrichissante grâce auquel elle a pu consolider son niveau de langue tout en découvrant véritablement ce qu’est la culture japonaise : “J'y ai appris beaucoup de choses, mon niveau de japonais a explosé, j'ai pu expérimenter des aspects culturels auxquels je n'aurais pas pensé ou pour lesquels je n'aurais pas eu les moyens financiers.”
C’est en revenant de ce voyage qu’elle a entrepris par la suite le master didactique des langues tout en continuant le master LLCER afin de devenir professeure de français au Japon. L’association de ces deux masters lui a permis d’améliorer significativement sa maitrise de la langue japonaise tout en apprenant à créer des cours de langue en français ou dans n’importe quelle langue.
Après les études
Après avoir validé ces deux masters, Pauline s’est installée au Japon et y a trouvé un emploi en tant que professeure de français à Ōsaka. Aujourd’hui, elle élabore et prend en charge de nombreux cours de français de niveau B1 et plus. Elle se charge actuellement de 24 cours différents pour lesquels elle jouit d’une grande liberté et prépare ses cours comme elle le souhaite, avec ou sans manuel.
Dans ces cours aussi bien pour enfants qu’adolescents ou même pour adultes, Pauline enseigne le français en utilisant ses capacités en langue japonaise afin d’expliquer les points de grammaire ou parfois même des points culturels :
“Le point fort est que je rencontre des gens intéressants qui ont envie d'en savoir toujours plus sur la langue ou la culture, et ça crée parfois des conversations longues d'échange culturel”.
Un conseil pour les futurs étudiants
Pauline finit par quelques mots sur sa spécialité, la langue japonaise, qui reste encore peu répandue : “Le japonais, ce n'est pas seulement les mangas et les animés. La langue est bien plus complexe et on ne devient pas bilingue en 3 ans de licence. Ce n'est pas une langue facile, mais il ne faut rien lâcher. N'abandonnez pas ! Ça en vaut le coup !”
“Un deuxième petit conseil : ne choisissez pas une licence de japonais seulement parce que vous aimez un peu la culture, les mangas et les animés. Il faut faire cette licence et ce master avec un projet professionnel en tête. Aucun des deux ne débouche sur un métier, il faudra les compléter avec des expériences professionnelles ou encore un autre diplôme professionnalisant. Posez-vous la question : en quoi ces études vont être utiles pour plus tard ? Pourquoi j'en ai besoin ?”
Benjamin SIEUW
Sourceur et sommelier de thé japonais : « Connaître le thé me permet de mieux comprendre les Japonais »
Après l'obtention d'une licence de psychologie à l’université Sorbonne Paris Nord, il découvre le monde du thé auquel il décide de consacrer sa vie. Il s'envole pour la première fois au Japon en 2015, une révélation pour lui. De retour en France, il entame en licence LLCE japonais et démarre une activité entrepreneuriale en rapport avec le thé en parallèle.
Issu d’une famille « passionnée par la gastronomie » et « éduqué aux parfums des épices et des aromates », il se retrouve à pousser les portes d’une maison de thé où il trouva « une richesse insoupçonnée : des dizaines de pays producteurs, quantité de terroirs, sept familles de thé, des méthodes de fabrication d’une diversité remarquable et un amour inconditionnel du produit chez les amateurs ». Avec trois membres de sa famille « chevaliers du taste-vin » il fait rapidement le rapprochement entre thé et vin, mais constate également que cette richesse est largement méconnue du public français.
Les débuts dans le thé
Suite à cette découverte, Benjamin s’adonne avec ferveur à l’étude du thé : « Je voulais tout en savoir » confie-t-il. Il commence à travailler comme vendeur dans cette même maison de thé puis chez d’autres « grands noms du thé en France ».
Premier voyage au Japon
Pour développer sa connaissance du thé, il visite le Japon pour la première fois en 2015 : « C’est ce premier voyage qui a fait naître mon ikigai, ma raison de vivre ». Suite à cette expérience, il se décide à entrer en LLCE japonais à Strasbourg pour « apprendre la langue et la culture japonaise » et rejoint le programme Etena afin de développer ses projets. En parallèle, il développe son activité indépendante centrée sur le thé : Curiousitea.
« J’ai toujours été sensible au langage »
Introduit très jeune « aux lettres et à l’art dramatique », il développe très tôt un fort attrait pour les langues, notamment le japonais, une langue qui l’a marqué « durablement ». En contact direct avec les producteurs japonais, parler la langue est primordial pour « tisser des liens forts » et « créer une relation de confiance sur la durée ». Ce contact privilégié qu’il possède avec les Japonais grâce à sa connaissance de la langue est ce qu’il y a « de plus enrichissant » dit-il. Cette connaissance du japonais et de la culture « ouvre des portes immenses » et permet « d’aller au plus près des racines de cette culture ».
Multitâche
Aujourd’hui, Benjamin est « sourceur et sommelier de thé, spécialisé dans le terroir japonais ». Il voyage régulièrement au Japon pour trouver de nouveaux thés et être en contact avec les producteurs. Il est également importateur, il distribue et met en vente les thés qu'il source directement sur sa boutique en ligne.
Engagé dans le développement de la connaissance du thé en France, il fait du consulting auprès de maisons de thé et fait aussi partie de « l’association des planteurs de thé en Europe » (Tea Grown in Europe Association). En plus de cela, il possède la casquette de formateur et anime la chaîne YouTube Curiousitea centrée sur « la vulgarisation autour du thé ». Plus récemment, il a lancé La Jance, « une agence de voyage proposant des expériences japonaises authentiques mais sur le territoire français ».
« Il ne faut jamais refuser une tasse de thé »
La découverte de nouveaux thés et de nouvelles saveurs demande « une forte implication personnelle ». Il faut « une curiosité de tous les instants », aller au contact des producteurs et ne pas hésiter à « sortir des sentiers battus ». Il étudie chaque thé dans ses moindres détails afin de transmettre les informations les plus précises possibles.
Son message aux étudiants :
« Pensez d’abord votre projet, prenez le temps, une année sabbatique, ou bien une année dans le monde du travail, tentez des expériences, voyagez… Il vous faut trouver ce qui vous anime d’abord et après seulement enclencher la formation en adéquation. Pour moi, ça a été le thé. »